Journée d'étude : L'Appartenance : conceptions philosophiques, écologiques et politiques contemporaines
Description
Dans son versant à la fois spatial et affectif, le monde écologique contemporain, celui de l’Anthropocène, peut être caractérisé par une mise en crise de nos relations avec les lieux, les milieux, les territoires et les espaces que nous habitons. Les difficultés sémantiques que nous éprouvons pour qualifier nos « environnements » vitaux est à cet égard tout à fait caractéristique. Mais une chose demeure certaine : l’Anthropocène résulte pour bonne partie d’une manière d’habiter la Terre qui met en danger la continuation de son habitabilité elle-même.
Face à une telle situation, certaines des tendances majeures de la pensée écologique contemporaine s’inscrivent dans des stratégies de « relocalisation », de « reterritorialisation » ou de « reterrestrialisation » de la politique. L’échelle locale fait ainsi l’objet d’une revalorisation théorique et politique majeure, reléguant le discours de la mondialisation néolibérale « hors-sol » au statut d’aberration idéologique, et ce alors même que le dérèglement climatique est un phénomène affectant le système-Terre de manière globale.
Qu’il s’agisse de mouvements aussi divers que le biorégionalisme (avec l’idée de « reinhabiting »), des variantes de communalisme ou de municipalisme éco-socialistes, de pensées inspirées de l’idée latourienne d’« atterrissage », de la réévaluation du modèle de la « maisonnée » dans les pensées écoféministes, de réflexions d’inspiration phénoménologique (comme celle de David Abram) ou encore de l’appel militant à réinvestir sous de multiples formes des milieux de vie qui sont en même temps des objets de lutte et des territoires de réinvention d’alternatives écologiques, politiques et sociales (les ZAD, les Soulèvements de la Terre) : la réflexion sur la nécessité d’un ancrage existentiel et écologique passant par le développement de nouvelles relations avec nos lieux de vie les plus proches est omniprésente dans la pensée contemporaine.
Nous souhaitons interroger cette tendance de fond à partir d’une réflexion sur l’idée même d’« appartenance » (pris au sens des termes anglais « to belong », « belonging »). Qu’est-ce en effet qu’appartenir à un territoire, à un lieu, à un milieu dans le contexte écologique et politique qui est le nôtre ? Car, force est de constater que l’idée d’appartenance et la valorisation du « local » sont affectées d’une certaine ambivalence, tant elles peuvent être « codées » dans les termes d’un ancrage identitaire, refermé sur lui-même, exclusif. Cela peut (et doit) être évité en pensant l’appartenance dans le sens de la terre aux sujets humains, et non pas dans le sens d’une propriété humaine de la terre comme simple ressource ou surface inerte et passive. En quoi les pensées écologiques contemporaines se distinguent-elles de discours, avec lesquels elles risquent de se confondre ou de se compromettre, d’une appartenance pensée en des termes potentiellement réducteurs ? Qu’est-ce qui différencie les formes contemporaines d’appartenance écologique et politique, de formes réactionnaires d’appartenance ethnique, raciale ou culturellement fantasmées ? Quelles relations aux lieux, quelles formes sociales et communautaires, quels types de cohabitation avec le non-humain, quels types d’affects, d’engagements et d’attentions sont impliqués dans les pensées écologiques contemporaines de l’appartenance ?
ces manifestations peuvent être validées dans le cadre du stage en équipe de recherche du master recherche en philosophie